Allocution de Macky Sall, Chef de l’Etat, président en exercice de l’Organisation pour la Coopération Islamique (OCI), lors de l’ouverture du sommet extraordinaire de l’organisation à La Mecque
BISMILLÂHI ARRAHMÂNI ARRAHÎMI
- Majestés,
- Altesses,
- Excellences, Messieurs les Chefs d’Etat et de Gouvernement,
- Mesdames, Messieurs les Ministres,
- Monsieur le Secrétaire Général de l’Organisation de la Coopération Islamique,
- Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs,
- Mesdames, Messieurs,
- Chers amis, frères et sœurs en Islam,
Assalâmou Aleykoum Wa Rahmatoullah Wa Barakâtouhou
A l’entame de mon propos, je rends grâce à Allah,
Soubhânahou Watâla, pour la faveur qu’Il nous accorde de nous réunir en
ce mois sacré de Ramadan, dans la Cité bénie de Makkah AL Moukarramah.
J’adresse mes remerciements les plus chaleureux à notre
frère, le Serviteur des Deux Saintes Mosquées, Sa Majesté le Roi
Abdallah Ben Adel Aziz Al-Saoud, pour l’hospitalité généreuse qui nous a
été réservée.
Merci également à vous, Professeur Ekemeleddin Ihsanoglu, pour vos efforts constants au service de notre Organisation.
En tant que Président nouvellement élu du Sénégal, ayant
en charge la Présidence en exercice de notre Institution commune, je
tends une main amicale à tous, pour contribuer à la réalisation de nos
idéaux partagés, dans un esprit d’ouverture, de solidarité et de
fraternité islamique.
Je salue l’initiative de Sa Majesté d’accueillir ce
rassemblement des Dirigeants de la Oummah islamique, sept ans après le
3e Sommet extraordinaire de l’OCI ici même, et quatre ans après notre
11e Sommet ordinaire à Dakar.
Je voudrais aussi rendre un hommage appuyé aux
nombreuses initiatives du Serviteur des Deux Saintes Mosquées en faveur
du dialogue des religions et des civilisations, pour l’entente cordiale
entre les peuples, dans le respect de leur diversité.
Nous tenons nos assises au moment où, sous la pression
d’évènements internes et internationaux, le monde musulman fait face à
des défis multiples et complexes, qui appellent de notre part des
réponses urgentes et concertées.
Aux problèmes économiques et sociaux qui affectent la
grande majorité des pays membres de la Oummah islamique, s’ajoutent des
turbulences intérieures sans précédent pour notre Communauté.
Si certains pays se sont remis de leur choc, d’autres restent convalescents ou en pleine tourmente.
Etant membres d’une même Communauté de valeurs et de
destin, nous sommes donc interpellés au plus haut point quand la
« fitna » se réveille parmi nous.
Le choix de notre thème, La restauration de la solidarité islamique, n’en est que plus pertinent.
Je suis gravement préoccupé par la violence au quotidien
dont la population syrienne est victime depuis plusieurs mois, sous le
regard impuissant de la communauté internationale, et au mépris des
règles humanitaires les plus élémentaires.
La tragédie qui s’abat sur le peuple syrien pose un problème de conscience à notre humanité et à notre foi de musulmans.
Tout a été dit sur l’horreur de la guerre et ses
conséquences humanitaires. Les observateurs ont témoigné et les images
parlent d’elles mêmes.
Face au refus répété des autorités syriennes d’entendre
nos appels, nous n’avons d’autre choix que de rester du côté du peuple
et de prendre la décision qu’appelle la gravité de la situation.
Au nom de la Oummah et des valeurs sacrées de l’Islam,
j’engage encore une fois le Gouvernement syrien à abréger la souffrance
de sa population et à créer les conditions d’un règlement pacifique de
la crise.
Nous sommes interpellés par la situation chaotique au
Nord Mali, où, en quelques jours seulement, des groupes terroristes,
puissamment armés et organisés, ont fini de prendre en otage les deux
tiers du pays.
Livré à la force brutale de la tyrannie, le Nord Mali,
est devenu une zone de non droit ; un lieu de prédilection pour le
recrutement et l’incubation du terrorisme international.
Comme en Syrie, la situation au Nord Mali doit rester au cœur de notre agenda.
L’Islam, comme l’a enseigné le Prophète Mohammed Paix et
Salut Sur Lui, est une religion du juste milieu, qui, en tout,
sollicite la raison, prône la sagesse et commande la modération.
Dès lors, la violence extrémiste n’est pas seulement un défi sécuritaire.
Elle est aussi une blessure morale portée à chaque
musulman et une atteinte grave au patrimoine, aux valeurs authentiques
de l’Islam.
Au titre des mesures que nous devrons prendre, je
propose que notre Sommet donne mandat au Secrétaire Général de nommer un
Envoyé Spécial pour la zone sahélo saharienne.
L’Organisation pourra ainsi mieux suivre la situation au
Nord Mali et les autres pays concernés et contribuer aux efforts de
règlement de cette crise majeure.
En plus des urgences en Syrie et au Mali, d’autres situations préoccupantes nous rappellent au devoir de solidarité.
Je pense aux discriminations injustes et aux
persécutions inacceptables dont nombre de minorités musulmanes font
l’objet dans leur propre pays en raison de leur foi et notamment au
Myanmar.
Je pense à la situation en Palestine, raison d’être historique de notre Organisation.
Je renouvelle notre soutien indéfectible aux
revendications légitimes de nos frères et sœurs palestiniens, pour un
Etat viable et souverain, avec Jérusalem Est comme capitale, siégeant
parmi les Nations libres et indépendantes.
- Majestés,
- Altesses,
- Excellences, Messieurs les Chefs d’Etat et de Gouvernement,
A l’heure même où se tiennent nos délibérations, des
millions de musulmans à travers le monde, confrontés à des questions
existentielles non résolues, restent privés du minimum nécessaire pour
mener une vie décente.
Au 3e Sommet extraordinaire de l’OCI, nous avions établi
un Fonds de solidarité islamique pour le développement afin de
combattre la pauvreté dans l’espace de la Oummah.
Sept ans après, je suis au regret d’informer notre
Sommet que sur un objectif initial de 10 milliards de dollars US, seuls
2,639 milliards de contributions ont été annoncés à ce jour, dont 1,633
milliard effectivement versé.
Nous sommes donc loin du compte, malgré tous les efforts
de mobilisation des ressources menés par la Présidence en exercice, le
Secrétaire Général et le Président de la Banque Islamique de
Développement.
Je lance à nouveau un appel solennel à tous les pays
membres, riches et moins nantis, pour que chacun contribue, selon ses
moyens, à cet instrument unique de solidarité au sein de la Oummah.
Dans le même sens, je souhaite que notre Sommet donne
les orientations nécessaires pour l’augmentation des capacités
d’intervention du Groupe de la BID afin de lui permettre de mieux
s’acquitter de sa mission de coopération pour le développement, d’appui
au secteur privé et de renforcement du commerce intra communautaire.
Il faut en même temps saluer les efforts que consentent
des pays partenaires pour soutenir des populations démunies et aider au
financement de projets de développement dans plusieurs pays.
Ces efforts sont certes louables. Mais l’aide, à elle seule, ne peut résoudre tous nos problèmes de développement.
Sur la base de nos complémentarités, nous devons donc
réinventer et élargir le contenu de la solidarité islamique en associant
nos moyens pour promouvoir davantage la production, le commerce et
l’investissement dans l’espace de la Oummah.
- Chers frères et sœurs,
Rassemblés par la grâce divine près de la Maison Sacrée
de Dieu, témoignons que dans Sa grande générosité, Allah nous a gratifié
de Ses bienfaits pour assurer l’autosuffisance et le rayonnement de la
Oummah. Mais la responsabilité nous incombe d’en faire bon usage au
service de notre bien être collectif.
Nous avons des terres fertiles et de l’eau en abondance.
Nous avons des ressources humaines, technologiques et financières sans
équivalent dans notre histoire.
Mais nous devons certainement apprendre à mieux nous connaître, mieux nous organiser et resserrer nos rangs.
Isolés les uns des autres, nous serons affaiblis, de
même que notre Oummah. Unis et solidaires, nous serons plus forts et
notre Oummah plus respectée.
En mettant ensemble nos intelligences et nos moyens,
nous pouvons assurer notre autonomie collective et réaliser, enfin,
l’objectif d’une Oummah forte, solidaire et prospère.
Cette Oummah forte, solidaire et respectée, sera une
Oummah où chaque musulman se sentira, non en assisté, mais en véritable
acteur du développement, utile à lui-même et à sa Communauté ; une
Oummah où chaque musulman pourra produire, manger à sa faim, se soigner,
s’éduquer et se loger décemment ; une Oummah où chaque musulman, libéré
de l’angoisse du besoin, pourra ainsi donner plein sens à sa vie
spirituelle et temporelle.
Cette Oummah, mes chers frères et sœurs, est à notre
portée, si nous mettons notre volonté politique à la hauteur de notre
destin commun.
Je souhaite que tous, ensemble, dans un élan de
solidarité renouvelée, nous nous donnions la main pour œuvrer à la
réalisation de ce noble objectif.
Nous le devons à nous-mêmes. Nous le devons à nos enfants. Nous le devons aux générations futures.
Je prie Allah dans Sa bonté infinie de guider nos
réflexions, de raffermir notre foi et de nous accorder la récompense
promise à ceux qui « se consultent entre eux à propos de leurs
affaires » (Sourate 42, verset 38) comme nous le faisons en cette
période sacrée, en ces Lieux bénis de Dieu.
Wa salâmou aleykoum wa rahmatoullah wa barakâtouhou
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