Discours du chef de l'Etat : « L’Etat et ses démembrements réduiront leur train de vie tout en restant performants »
A l'occasion de la célébration de la fête de l'Indépendance, le chef de l’Etat s’est adressé pour la première fois à la Nation. Voici l’intégralité du discours.
Sénégalaises, Sénégalais,
Mes chers compatriotes,
Hôtes étrangers
qui vivez parmi nous,
Demain, 4 avril 2012, nous célébrons, dans la joie des cœurs et la communion des esprits, le 52e anniversaire de l’accession de notre pays à la souveraineté internationale.
Je suis heureux de m’adresser à vous en de pareilles circonstances pour la première fois.
En raison des contraintes liées au processus électoral qui vient de s’achever, la cérémonie de cette année, que je veux sobre, se limitera en une prise d’armes à la place de l’Indépendance.
Ce moment solennel de rassemblement autour des valeurs fortes de la Nation et de la République, rappelle à notre mémoire collective les liens indéfectibles qui fondent notre commune volonté de vivre ensemble et notre destin solidaire.
Célébrer notre indépendance, c’est honorer le courage et l’esprit de sacrifice de nos héros. Par la résistance armée ou pacifique, ils se sont opposés à l’asservissement de notre peuple, au péril de leur vie.
Je salue la mémoire de nos morts et prie avec vous pour le repos de leur âme.
J’ai une pensée affectueuse pour tous nos concitoyens établis à l’étranger. Au nom de la Nation, je les encourage et les félicite pour leur contribution précieuse aux efforts de développement de notre pays.
Mes chers compatriotes,
Je salue à cette occasion nos braves et chers anciens combattants.
Aux heures sombres de la guerre, c’est vous, chers anciens combattants, qui étiez à l’avant-garde du combat pour contribuer à la défense du monde libre et précipiter la marche de notre peuple vers l’indépendance.
Puissent les vertus élevées que vous incarnez avec sagesse et dignité nous inspirer et servir de viatique aux générations actuelles et futures.
La fête de l’indépendance, c’est aussi et surtout celle des Forces Armées, nos vaillants Jambaars, dont je voudrais magnifier la contribution à la construction de la Nation pour un Sénégal debout et rayonnant.
Le thème retenu cette année, « Forces de défense et de sécurité et coopération internationale », donne la pleine mesure des exigences que doit remplir une Armée Républicaine et moderne.
Dans un monde en pleine mutation, ces exigences se déclinent en termes de formation, d’entrainement, d’équipements et d’infrastructures de qualité pour que notre Armée réponde, de manière efficace, à ses missions fondamentales.
Ayant déjà personnellement visité un certain nombre de postes sur le terrain, je mesure mon devoir, en ma qualité de Chef suprême des Armées, de vous apporter le soutien nécessaire pour améliorer vos conditions matérielles et d’existence, donc le moral.
Je tiens particulièrement à une plus juste réparation en faveur des mutilés et blessés de guerre, par un relèvement conséquent du taux de base de la pension.
J’attache aussi une grande importance à la poursuite diligente des programmes sociaux et d’équipement des Forces Armées.
A vous, Officiers, Sous Officiers, Militaires du rang, je voudrais dire ma fierté et ma confiance.
Partout où le devoir vous appelle, au service de la Nation comme de la communauté internationale, et souvent dans des conditions difficiles d’opération, vous exécutez votre mission avec courage et professionnalisme, dans le respect des lois et règlements.
Je remercie tous les pays amis engagés à nos côtés dans le partenariat pour le renforcement des capacités de nos Forces de défense et de sécurité.
Le 4 avril est, enfin, votre fête, vous, jeunes du Sénégal.
Je connais l’ampleur de vos attentes en matière d’éducation, de formation professionnelle et d’emploi ; trois priorités essentielles qui occuperont en permanence l’agenda de mon Gouvernement.
Mes chers compatriotes,
Cette année, nous célébrons la fête nationale dans un contexte particulier. Nous venons, en effet, de sortir d’un long et historique processus électoral qui a révélé, une fois de plus, à la face du monde, toute la vitalité de notre système démocratique et la grande maturité du peuple sénégalais.
En définitive, c’est tout le peuple sénégalais qui en est sorti victorieux et revigoré.
J’exprime ma gratitude aux pays amis qui nous ont soutenus dans ce processus et à tous les observateurs, nationaux et internationaux, témoins vigilants du bon déroulement du scrutin. Après l’étape historique du 25 mars 2012, nous voici sur le chemin de notre destin commun, forts de la conviction partagée que la Nation sénégalaise est une et indivisible.
Mes Chers compatriotes,
Je suis le Président de tous les Sénégalais, sans distinction aucune.
J’ai foi dans le génie créateur de notre peuple et je compte fédérer toutes les compétences et toutes les intelligences au service de notre bien être commun.
Face au destin national, je mesure la gravité de la charge qui m’incombe.
Je suis déterminé à donner le meilleur de moi-même, avec l’équipe qui m’entoure, pour mériter votre confiance et remplir fidèlement mon devoir de gardien de la Constitution, de garant de l’intégrité territoriale, de la cohésion nationale et du fonctionnement régulier de nos Institutions républicaines.
A cet égard, le retour définitif de la paix dans la région naturelle de Casamance constitue pour moi l’une des premières priorités nationales.
Bien entendu, j’aborde cette douloureuse question avec prudence et lucidité, dans un esprit d’écoute et d’ouverture.
C’est pour moi l’occasion de tendre une main fraternelle aux dirigeants et aux combattants du Mfdc. Toutes les bonnes volontés et toutes les compétences nationales seront mobilisées pour le règlement pacifique de ce conflit qui n’a que trop duré.
Mieux encore, ma volonté est certaine d’y associer les Républiques sœurs de Gambie et de Guinée Bissau. La paix revenue, la verte Casamance, riche de son potentiel naturel et humain, offrira toutes les possibilités d’investissements publics et privés pour la prospérité de nos populations.
Mes chers compatriotes,
Au Gouvernement, je donne mission de traduire en actes la forte aspiration au changement massivement exprimée le 25 mars.
Cette occasion historique constitue pour nous tous, un nouveau départ pour une nouvelle ère de ruptures en profondeur dans la manière de gérer l’Etat au plan institutionnel et économique.
C’est pourquoi, je tiens à ce que toutes les femmes et tous les hommes qui m’accompagnent dans l’exécution du contrat de confiance qui me lie au peuple, comprennent et acceptent que cette mission ne crée pas une catégorie de citoyens privilégiés, au-dessus des autres et de la loi.
Au contraire, cette charge se décline en un sacerdoce sans ambiguïté : il est question de servir et non de se servir. Déjà, comme vous le savez, j’ai décidé de ramener à cinq ans le mandat de sept ans pour lequel je suis élu sous l’empire de l’actuelle constitution.
Je tiens, également, à ce que les dispositions constitutionnelles limitant l’élection du Président de la République à un mandat de cinq ans, renouvelable une seule fois, soient verrouillées sans possibilité de modification. Toujours sur ce chapitre, je vous annonce que compte tenu des délais courts qui nous séparent de la date de dépôt des listes pour les élections législatives prévues le 17 juin 2012, j’ai consulté la nouvelle opposition afin de convenir, d’un commun accord, du report de ces élections.
Faute de consensus, l’Assemblée nationale sera dissoute conformément aux dispositions constitutionnelles.
En conséquence, les élections législatives se tiendront le dimanche 1er juillet 2012.
Mes chers compatriotes,
Gouverner autrement, c’est bannir les passe-droits, le favoritisme et le trafic d’influence ; c’est mettre l’intérêt public au-dessus de toute autre considération et traiter tous les citoyens avec la même dignité et le même respect. En outre, l’Etat et ses démembrements réduiront leur train de vie tout en restant performants. Ainsi, afin de rationaliser nos dépenses budgétaires, éviter la dispersion de nos faibles moyens et revenir à l’orthodoxie administrative, j’ai décidé de ramener au strict minimum nécessaire la pléthore des Agences.
S’agissant des missions à l’étranger, le Premier Ministre veillera, avec soin, à leur opportunité, à la taille et à la durée de séjour des délégations.
J’ai également donné des indications précises pour la rationalisation de notre carte diplomatique.
En ce qui concerne les manifestations, publiques ou privées auxquelles des Officiels prennent part, les Services compétents de l’Etat mettront en place, dans les meilleurs délais, de nouvelles dispositions, notamment protocolaires, pour en simplifier le cérémonial, afin d’éviter des pertes de temps et les désagréments occasionnés par les cortèges.
Ces mesures ne sont pas exhaustives. Elles seront complétées par d’autres, que j’annoncerai ultérieurement.
De même, notre Administration devra créer un environnement plus convivial, fait de respect, de courtoisie et de transparence pour délivrer un service de qualité au bénéfice des usagers. Il ne saurait y avoir de place pour l’arrogance, l’autoritarisme, le règlement de comptes ou la sollicitation de privilèges et avantages indus.
Mes chers compatriotes,
S’agissant de la gouvernance économique, je serai toujours guidé par le souci de transparence et de responsabilité dans la gestion vertueuse des affaires publiques.
Je mets à ma charge l’obligation de dresser les comptes de la Nation et d’éclairer l’opinion sur l’état des lieux.
Je compte restituer aux organes de vérification et de contrôle de l’Etat la plénitude de leurs attributions.
Dans le même sens, l’assainissement de l’environnement des affaires et la lutte contre la corruption et la concussion me tiennent particulièrement à cœur.
A tous ceux qui assument une part de responsabilité dans la gestion des deniers public, je tiens à préciser que je ne protègerai personne. Je dis bien personne !
J’engage fermement le Gouvernement à ne point déroger à cette règle.
Mes chers compatriotes,
Au moment où j’entame mon mandat, les urgences sont nombreuses et les attentes pressantes.
Tout est urgent.
Je demeure préoccupé par la grave perturbation de l’année scolaire et universitaire. Néanmoins, je fais confiance aux partenaires sociaux afin que, dans un sursaut patriotique, ils nous donnent la chance d’épargner à notre système éducatif, déjà mal en point, les conséquences désastreuses d’une année blanche ou invalidée.
Ainsi en est-il de tous les secteurs en désarroi qui méritent une attention particulière.
Pour sa part, le Gouvernement est disposé à entamer la concertation sur chaque plateforme revendicative.
Mes chers compatriotes,
Ces dernières années, je les ai passées à sillonner le pays d’Est en Ouest, du Nord au Sud.
Cela m’a amené à mieux appréhender les nombreux problèmes dont souffre notre pays.
Il y a urgence, dans nos villes et nos banlieues, de lutter contre le chômage, les inondations, l’insécurité et la paupérisation.
Il y a urgence dans le monde rural à prendre en charge les besoins en matière d’infrastructures, d’accès à l’eau potable, à l’électricité et aux services sociaux de base. Dan ce cadre, je lance un appel à nos partenaires bilatéraux et multilatéraux pour soutenir nos efforts de mise en place d’un programme d’urgence visant à assister les zones rurales touchées par le déficit alimentaire.
Parallèlement, le Gouvernement préparera, sans délai, la prochaine campagne agricole.
Il y a urgence à agir dans le secteur de la pêche. Je suis déterminé à revoir les conditions d’octroi des licences de pêche et à lutter fermement contre les navires pirates qui pillent nos ressources halieutiques.
Il y a urgence aussi à agir en matière de santé publique. Notre plateau médical reste encore limité, les effectifs réduits et l’accès au service de santé hors de portée de la majorité des patients.
C’est pourquoi, au-delà d’un nouveau volontarisme dans le renforcement de l’équipement sanitaire, je compte lancer, en concertation avec les acteurs concernés, un programme de couverture maladie universelle et une sérieuse réflexion sur la gouvernance sanitaire.
Il y a urgence à agir contre le chômage des jeunes, qui aspirent à se prendre en charge et à être utiles à leur famille, à leur communauté et à la Nation.
Enfin, il y a urgence à agir pour la prise en charge de la demande sociale, par la réduction des prix des denrées de première nécessité ; notamment le riz, le sucre et l’huile.
J’ai, d’ailleurs, sur ce point, engagé le Gouvernement à mener rapidement les consultations nécessaires avec les industriels et les commerçants afin d’examiner les conditions et modalités de la baisse des prix de ces produits.
Au demeurant, mon option, pour la satisfaction de la demande sociale, consiste à explorer toutes les possibilités d’économies budgétaires, et toutes les niches de gaspillage dans le seul but de mobiliser des ressources suffisantes pour le soutien aux ménages.
Le programme de développement économique et social que je vous ai proposé contient les mesures que je compte mettre en œuvre pour placer notre pays sur la voie de l’émergence économique et sociale.
Je mettrai également en place une Commission pluridisciplinaire qui me soumettra des recommandations précises dans le cadre de la mise en œuvre des conclusions des Assises nationales.
Mes chers compatriotes,
Alors que s’achève bientôt le Carême, je m’associe à la ferveur et à la communion de nos frères et sœurs chrétiens. En Nation de croyants, nous garderons toujours la foi et l’espérance pour des lendemains meilleurs. C’est fort de cette conviction que je m’engage à me donner corps et âme pour que notre pays demeure une terre de paix, et continue sa marche résolue vers plus de prospérité et de bien être.
Je joints mes prières aux vôtres pour que Dieu Le Tout -Puissant nous place sous sa divine protection.
Vive le Sénégal,
vive la République !
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